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[Tribune] L’État veut-il en finir avec l’investissement locatif privé ?

Tribune d’Arnaud Hacquart, président-fondateur d'Imodirect

Alors que notre pays fait face à de nombreux défis, l’État semble vouloir la fin de l’investissement locatif privé. Les gestes malheureux se multiplient et les contraintes diverses finissent par dissuader les plus attachés à la pierre de se constituer un patrimoine contribuant à loger les Français.
Aujourd’hui, l’accession à la propriété, et surtout la primoaccession, s’enraye. Alors que les taux d’intérêt bas ont favorisé un âge d’or de l’accession, les dérèglements économiques ont fait passer, en moins d’un an, de 60% à la moitié, la part des primo-accédants dans les achats immobiliers ! Les besoins en logements se reportent donc sur le parc locatif privé, les faibles capacités des HLM, 5,5 millions de logements, ne pouvant accueillir les 2/3 de la population pourtant éligibles.
 
Les tensions sur le parc privé s’accentuent : le site d’annonces Bien’ici constate une hausse de près de 70% du déséquilibre entre l’offre et la demande de locations. A cela s’ajoute la nécessité, plus impérieuse que jamais, pour les Français qui le peuvent d’acquérir un bien locatif, afin de compléter leur retraite.
 
D’abord, la transition écologique, dont on ne saurait nier le bien fondé, est mal orchestrée et à marche forcée. Ainsi le principe consistant à dégrader les biens quand les informations techniques font défaut équivaut à dire que s’il ne peut produire son carnet de santé, un patient est malade. Et le mal est onéreux : redresser la performance énergétique d’un bien locatif en copropriété coûte entre 15 et 30 000€, et plus pour une maison. Le DPE (diagnostic de performance énergétique) est probablement mal né : une première version peu exigeante, une deuxième opposable juridiquement… mais suspendue face aux aberrations produites. 100 000 logements devront être de nouveau diagnostiqués par un troisième DPE. Ce futur super DPE, appelé audit énergétique, ne va pas mieux : son entrée en vigueur, repoussée deux fois, est attendu pour le 1er avril et certains craignent une mauvaise blague.
 
Or, la loi Climat et résilience fixe un calendrier d’interdictions de louer sévère : depuis le 24 août 2022, les loyers des logements classés F ou G ne peuvent être augmentés. Depuis ce 1er janvier, les plus énergivores des logements en G ne peuvent plus être reloués. D’ici à 2034, tous les biens E, F ou G, près de 75% du parc locatif, suivront cette même règle.
 
Le préjudice est double : les locataires ne vont plus trouver de locations et les propriétaires bailleurs devront faire face à des dépenses supérieures à leurs capacités financières. Même si les aides publiques existent, le reste à charge sera de 80% pour 60% d’entre eux et au-delà de 60 ans, plus question d’emprunter. De plus, les biens concernés ne pourront être vendus à des investisseurs, les banques ne prêtant plus pour acquérir des logements destinés à la location disqualifiés par le DPE, le remboursement du prêt se trouvant compromis par l’interdiction de louer.
 
Les investisseurs qui finiront par vendre devront accepter une décote, cela ne se fera pas aisément. Dès lors, gageons qu’il y’aura des opportunités pour des investisseurs professionnels, marchands de biens rénovateurs.  
 
Or, une politique du logement ne se fonde pas sur le cynisme, en favorisant certains acteurs au détriment de millions de petits porteurs de l’immobilier ! De plus, ces logements, une fois rénovés, pourraient être occupés par leurs acheteurs, et le parc locatif s’en trouvera appauvri.
 
A cet inventaire des erreurs, on pourrait ajouter entre autres le plafonnement des loyers, ou encore le permis de louer, censé éradiquer les logements indignes et les marchands de sommeil par des obligations déclaratives.

Puisque le Président Macron a intégré le logement au Conseil national de la refondation, osons repenser la politique de l’investissement locatif, en sortant de l’approche punitive et aveugle. Ne sacrifions pas sur l’autel de l’écologie l’offre locative, vitale pour la France à un point qu’elle n’a jamais connu.

Cette tribune a été publiée dans Les Échos, en date du 20 mars 2023 : https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/opinion-letat-veut-il-en-finir-avec-linvestissement-locatif-prive-1917340