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20 oct. 2023
Les ventes de matériaux de construction impactées par les difficultés du logement neuf
Le ralentissement de la dynamique de construction de logements neufs n’est évidemment pas sans conséquences sur les ventes des fabricants et distributeurs de matériaux de construction : les industriels du secteur font entendre leurs inquiétudes.

« L’inflation, les taux d’usure, et la difficulté d’obtenir des prêts pour les primo-accédants affectent la construction résidentielle. Le retournement est très brutal », souligne ainsi Frédéric Didier, président de la Fédération française des tuiles et des briques (FFTB). En glissement annuel sur sept mois à fin juillet 2023, les mises en chantier de logements ont baissé de 16,9 % (-21 % sur le logement individuel et -13 % sur le collectif), et les autorisations de construire de 28,3 % (-33,4 % pour les maisons individuelles, et -24,5 % sur le collectif) d’après la Fédération française du bâtiment (FFB), qui anticipe déjà, « si rien n’est fait », un recul d’environ 8 % hors effet prix de l’activité du bâtiment à l’horizon 2025, et près de 150 000 destructions de postes.  


Gros œuvre et isolation premiers concernés 

« Il y a clairement une baisse de la construction de maisons individuelles, le lieu préféré d’habitation des Français, ce qui se ressent aussi sur l’aménagement extérieur. C’est l’une des familles de produits qui va le plus en souffrir. Avec l’objectif de zéro artificialisation nette, cela va encore davantage baisser », précise Charles-Gaël Chaloyard, le directeur général de Tout Faire (450 points de vente en France et en Belgique. 1,5 milliard de chiffre d’affaires en 2022, 4 000 personnes), un groupement de négoces de matériaux. Fin septembre 2023, son entreprise présentait une baisse de 1,5 % de chiffre d’affaires sur un an, malgré une inflation à 10 %. Produits les plus concernés par cette stagnation à la baisse depuis début 2023, le gros œuvre et l’isolation. Les matériaux destinés à l’aménagement extérieur reflètent aussi, logiquement, le recul des ventes de maisons. « La majeure partie des préoccupations se concentrent sur les maisons individuelles qui accusent une chute libre », ajoute ainsi Laurent Martin Saint Léon, délégué général de la Fédération des distributeurs de matériaux de construction. 


De premières baisses d’activité dans certaines usines ?  

Pour les entreprises adhérentes de la Fédération française des tuiles et des briques (135 lignes de fabrication, 4 500 emplois directs, 900 millions d’euros de chiffre d’affaires), cette diminution des commandes en lien avec la crise du logement se fait réellement ressentir depuis juin. La baisse estimée des ventes de briques entre septembre 2022 et septembre 2023 serait ainsi de 35 % à 40 % (environ 35 % des logements neufs sont en briques), et les stocks des industriels atteignent des niveaux inédits.  

Même constat pour l’Association française pour la pompe à chaleur, dont le président François Deroche prévoit une baisse de la demande à partir de la fin d’année 2023 et du début 2024 pour les matériels destinés aux maisons individuelles, et dans les deux à trois prochaines années pour le logement collectif. Du côté d’Inoha, association regroupant 260 industriels de l’amélioration de l’habitat (aménagement intérieur, jardinerie, rangement, cuisine, salle de bains, chauffage...), avec 500 sites et 50 000 salariés, on attend « Pour le pire des cas, […] des suppressions de postes. On adapte les structures, avec un peu de chômage partiel aussi. Si les choses continuent, je crains que cela s’empire », souligne son président Jean-Luc Guéry, qui regrette aussi les conséquences de l’inflation sur ces produits « non essentiels ». L’indice Insee des prix à la consommation des meubles et articles d’ameublement a progressé de 3,8 % entre septembre 2022 et septembre 2023, et celui des luminaires de 4,1 %. Le poste logements, eau, gaz, électricité et autres combustibles a lui augmenté de 5,8 % en un an. 


Des catalogues de plus en plus tournés vers la rénovation 

Les hausses de prix pourraient avoir un impact sur le segment de la rénovation, considéré comme le « dernier » espoir de nombreux acteurs du secteur. Ce marché, qui compte pour 54 % de l’activité du bâtiment selon la FFB, a vu une hausse de 2,4 % de ses volumes sur un an au deuxième trimestre 2023, et de 2,3 % pour la rénovation énergétique. « Le marché des tuiles est davantage lié à la rénovation. On sait combien la toiture est importante dans ce type de projets, puisqu’on en profite pour faire de l’isolation et réduire la facture d’énergie », ajoute Frédéric Didier. « Face aux difficultés du neuf, nos adhérents se rendent bien compte qu’il y a une manne sur la rénovation énergétique, et le négoce peut jouer le rôle de tiers de confiance », confirme Charles-Gaël Chaloyard. Un tiers des négoces du groupement Tout Faire proposaient jusqu’alors des produits de menuiserie, comme les fenêtres : un chiffre qui devrait croître avec un renforcement du catalogue. « Tout le monde va se rabattre sur la rénovation. Les fabricants vont s’y réorienter », résume-t-il. L’impact de la refonte du dispositif d’aides gouvernementales MaPrimeRénov’, réorienté sur les gestes de rénovations globales, est attendu à partir de janvier 2024, de même qu’une éventuelle intervention du législateur face aux tourments du logement neuf. Vendredi 13 octobre, la Première ministre Elisabeth Borne a lancé une concertation avec les élus des intercommunalités pour décentraliser la politique du logement. 


Source : L’Usine Nouvelle / reproduction interdite 

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