Comprendre l'immobilier

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10 mai 2022
L’immobilier à Dubaï, destination du blanchiment d’argent
Le think tank américain Center for Advanced Defense Studies a eu accès d’une fuite de données sur les données cadastrales de l’émirat de Dubaï, permettant de mettre en place avec vingt médias internationaux, dont Le Monde, l’enquête « Dubai Uncovered », révélant l’ampleur du blanchiment d’argent dans l’immobilier de la plus grande ville des Emirats Arabes Unis.

L’enquête a permis de révéler l’identité de 274 000 propriétaires de 800 000 biens immobiliers situés à Dubaï, l’un des centres financiers les plus opaques de la planète : on y retrouve, outre des hommes et femmes d’affaires bien sous tous rapports, venus profiter du dynamisme de l’émirat, un grand nombre de personnes impliquées dans des activités criminelles (fraude, corruption, trafic de drogue…), poursuivies par la justice. De surcroît, depuis la mise en place des sanctions contre la Russie, le GAFI, l’organisme mondial antiblanchiment, a mis Dubaï sur la liste grise des Etats priés de combler leurs failles en matière de lutte contre l’argent sale, craignant que les oligarques russes n’y délocalisent leurs fortunes. 

L’appartement dubaïote, le nouveau compte suisse ? 

On peut ainsi citer chez la centaine de personnalités russes Alexandre Borodaï, un des leaders des séparatistes prorusses ukrainiens, propriétaire d’un appartement du complexe résidentiel Grandeurs Residences-Maurya, ainsi que son voisin, le député communiste Roman Liabikhov. Dans les personnalités prorusses, il faut aussi citer Rouslan Baïsarov, un proche du dictateur tchétchène Ramzan Kadyrov, ou Dmitri Rybolovlev, le très controversé actionnaire majoritaire de l’AS Monaco. Ceux-ci auraient délocalisé leurs avoirs depuis Chypre devant l’ampleur des sanctions internationales. 
Parmi les personnalités funestes dubaïotes, l’enquête cite également le promoteur de boxe irlandais Daniel Kinahan, trafiquant de cocaïne soupçonné en cavale, propriétaire de 115 m² de bureaux dans la tour Jumeirah Bay X3 et en cavale à Dûbaï ; le Tchèque Tibor Bokor, directeur exécutif d’une Bourse de cryptomonnaies sanctionnée par le Trésor américain, qui détient trois appartements à Dubaï, l’homme d’affaire slovaque Miroslav Vyboh, recherché par corruption et possesseur d’un appartement à 2,7 millions de dollars dans l’euros, et de nombreux suspects de l’escroquerie internationale « Cum-Ex ». 3 256 Français, possédant un peu moins de 5 000 propriétés, d’une valeur moyenne de 400 000 dollars, sont également cités. 

L’enquête « Dubai Uncovered » évalue à au moins 146 milliards de dollars la valeur des biens immobiliers détenus par des étrangers à Dubaï, soit un tiers du marché immobilier de l’émirat et 27 % des biens recensés à Dubaï : le montant est deux fois supérieur à la valeur des appartements et maisons de Londres détenus par des non-résidents et supérieur à la valeur totale des actifs immobiliers français détenus par des non-résidents. « Le risque est que l’immobilier à Dubaï remplace le compte en Suisse comme stratégie d’évasion fiscale ou de dissimulation de patrimoine », estime Gabriel Zucman, professeur associé à l’université de Californie à Berkeley, qui dirige l’Observatoire de la fiscalité de l’Union européenne.  A titre d’exemple, 70 % du patrimoine détenu par des Norvégiens à Dubaï n’a pas été déclaré. 

Source : Le Monde / Reproduction interdite 

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